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Laurent Rouzeau,
Directeur Juridique Groupe Axis Partners
    Instituée par la loi n°94-1 du 3 janvier 1994 et réformée cinq ans plus tard par la loi n°99-587 du 12 juillet 1999, la Société par Actions Simplifiée (ci-après "SAS") suscite depuis cette date un engouement exceptionnel. Au 1er juillet 1999, l'Insee recensait 2.370 SAS, Début 2002, elles passaient la barre des 23.683 sièges sociaux pour culminer, au 1er janvier 2003 à 43.665, soit une croissance mensuelle de près de 1.480 unités et un pourcentage d'augmentation, sur douze mois, de plus de 84%.

Signe de sa banalisation, on relève sa présence aujourd'hui dans tous les secteurs de l'économie. On la trouve aussi bien dans le secteur de l'immobilier (14.454 SAS) où elle commence à concurrencer les Sociétés Civiles Immobilières, que dans le secteur de la construction (2.374 SAS) et dans le commerce et la distribution d'articles domestiques (10.517 SAS). Par ailleurs, après avoir été une société "parisienne", ses effectifs sont aujourd'hui répartis sur l'ensemble du territoire prouvant que son avenir n'est plus limité aux grands groupes dont les sièges sociaux sont traditionnellement regroupés en région parisienne.

Société tout terrain.
Ces données permettent de comprendre la nature systémique de la SAS sur le paysage sociétaire. Ils confirment qu'elle n'est plus limitée aux seules opérations de coopération et qu'elle passe au contraire de plus en plus, aux yeux des entrepreneurs, comme une société tout terrain. Au demeurant, parce qu'elle conjugue responsabilité limitée et souplesse contractuelle, on peut se demander si les formes traditionnelles telles, que la SA, la SARL et la SNC conservent encore quelques atouts. Le fait que son régime légal autorise les associés à contrôler la qualité et la géographie de l'actionnariat, à se dispenser d'un organe collégial de direction, type conseil d'administration, qu'il permette, en outre, de déroger aux règles de majorité au sein des assemblées et qu'elle puisse, enfin, être constituée par une seule personne, physique ou morale sont en effet des atouts incomparables.

Certes, ses effectifs restent encore marginaux par rapport à la SA qui compte selon l'Insee, au 1er janvier 2003, 134.128 sièges et à la SARL qui en compte elle 906.466. Pour autant, la SARL, et plus nettement encore la SA, marquent le pas et perdent, proportionnellement, du terrain à mesure qu'elle progresse. Le renforcement des contraintes légales à l'égard de la SA, notamment à travers la loi sur les Nouvelles régulations Economiques du 15 mai 2001, ne fait qu'accentuer cette tendance. Ainsi, de nombreux groupes n'ont pas hésité, pour "détourner" les dispositions impératives de cette loi, à transformer toutes leurs filiales non cotées.

Chamboulement.
Quant à la SARL, dont on sait qu'elle souffre toujours d'une certaine discrimination, tant sociale que fiscale, et d'un déficit d'image, on peut se demander comment elle parviendra à conserver son attractivité. Le projet de loi pour l'initiative économique, adopté en première lecture par l'assemblée nationale le 11 février dernier, qui prévoit notamment de modifier l'article L.223-2 du Code de commerce en laissant aux associés la liberté de déterminer le montant du capital social ne devrait que fragiliser sa crédibilité à l'égard des PME.

In fine, cette généralisation de la SAS semble confirmer qu'elle s'impose progressivement, grâce à son exceptionnelle souplesse d'aménagement, comme une forme sociale consensuelle et multifonctions. D'où, l'éclipse inévitable des formes sociales traditionnelles. Ainsi, plus encore qu'un simple processus de contractualisation ou de déréglementation, la SAS chamboule l'ordonnancement juridique et laisse entrevoir la possibilité d'une véritable réforme "paradigmatique" du droit des sociétés.

  1. Pour une étude approfondie de ce sujet consulter, "Evolution statistique de la Société par Actions Simplifiée", Laurent Rouzeau, Bulletin Joly Sociétés, Novembre 2002.


La Tribune du 10 avril 2003

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